On
le redoutait depuis un certain temps. Mais cela promet d’être un peu
différent de ce qui a été décrit par Orwell ou Huxley. Toujours est-il
que les machines menacent à présent d’influer de façon significative et
durable sur le comportement humain. Un exemple qui illustre ce fait :
Tout traducteur est persuadé qu’aucune machine ne pourra jamais le
remplacer. Or ce n’est pas tout à fait exact. Bien sûr, aucune machine
ne pourra jamais traduire Baudelaire, Kleist ou Shakespeare dans une
autre langue sans produire par endroits un charabia d’un comique sans
nom. Mais admettons qu’il s’agisse de produire un texte destiné d’entrée
de jeu à être traduit dans n’importe quelle autre langue. Lors de la
rédaction, l’auteur sera en contact avec une machine qui interviendra à
chaque difficulté ou ambivalence. Prenons par exemple le mot français “lever”, que la machine doit traduire. Admettons qu’elle ait emmagasiné les équivalents suivants : “élever“, “soulever“, “rehausser“, “ôter“, “mettre sur pied“ etc.
La machine demandera alors de choisir et rédacteur sera contraint
d’éliminer par ce choix tout double sens de son texte. Ainsi, la machine
gagne de l’influence sur la mise en œuvre du texte et par voie de
conséquence sur le comportement ultérieur du rédacteur. L’important dans
ce cas, c’est l’impératif de communicabilité dans le cadre d’un monde
globalisé où quelque chose comme une machine à traduire paraît
essentielle. Et ce qu’on élimine avec les ambivalences, les sens
multiples d’un texte, ce sont les différences culturelles, les
particularismes. De même, les rédacteurs ne pourront plus utiliser
certains mots intraduisibles : leurs textes deviendront plats,
univoques. Le moteur de recherche Google permet de rendre
compte de l’état actuel [2010] des machines à traduire puisqu'il propose
la traduction automatique de certaines pages en langue étrangère. Une
petite expérience montre le chemin qui reste à parcourir pour atteindre
une perfection improbable. Il y a quelques années, j’ai traduit le
dernier essai du regretté penseur Dietmar Kamper (2001). Voici la
version française du paragraphe final :
“Dans
l’intervalle, on va chercher conseil à Hollywood. Il semble que
l’imagination ardue des cinéastes, surtout dans le registre des films à
catastrophes, est plus précise que les archives des services de
renseignements et les informations de la presse. Durant toute cette
période de réflexion et de commentaire, on a déjà essayé de repérer dans
l’imagination humaine un précepte subtil en lieu et place d’une
représentation de la réalité. Certains sont parvenus à une virtuosité
dans les métaphores et les chiasmes, qui suggèrent de leur côté la
conclusion improbable que la pensée humaine puisse se rendre maître des
mots et des images, tout en acceptant le délire de départ. C’est ce que
Friedrich Kittler a récemment montré dans une chevauchée forcenée à
travers l’histoire mondiale. En épilogue à Nietzsche et Foucault, on
peut y lire: “Le vieil effroi nous glace. Sur sa fière monture, Ben
Laden se montre aux caméras de la presse. Debout dans des jeeps, les
jeunes émirs d’Arabie auraient atterri voici peu d’années au Nord du
Pakistan, où les écoles coraniques fleurissent, pour transposer sous les
tentes, avec les contes et les nuages de poussière leur art médiéval de
chasse aux oiseaux dans une actualité de haute technologie : les jeeps
ont succédé aux chevaux, les charters aux chameaux; seul le faucon
domestiqué et sa cible, un oiseau de proie nomade qui tourne dans le
ciel de la steppe, restent vaillants jusque dans la mort. Nous oublions
que les Croisés et les Sarrasins montaient les mêmes chevaux, avant que
le vieux de la montagne ne lâche ses Assassins – haschischins et
meurtriers en même temps – sur les deux à la fois.” (Frankfurter Allgemeine Zeitung du 5/10/2001: "Ceux pour qui le désert croît. Le nouveau terrorisme et ses nomades"). La couleur de la scène: lapis-lazuli. “
Cette version n’est certainement pas parfaite. Or la traduction automatique du texte allemand proposée par Google donne ceci :
“Au
lieu de cela, on cherche à Hollywood Conseil. Il semble que les
imaginations ausgekochten des réalisateurs, en particulier en direction
de la catastrophe de films, précise que les archives des services de
renseignements et les données de la presse. Pendant toute cette période,
des réflexions et des commentaires, on a tenté, dans l’imagination
humaine, une disposition subtile de l’image au lieu d’une fois à la
réalité planétaire. Certains d’entre eux ont à la virtuosité des
métaphores et Chia mis de Mata, qui viennent à leur tour venait à
conclure, à la pensée humaine, le Seigneur et maître des mots et des
images, avec le délire dans l’achat initial est pris. Friedrich Kittler,
le Parforce dans une chevauchée de l’histoire à travers le monde
récemment dans le pays. À la suite de Nietzsche et de Foucault est là,
il est écrit: «Le vieil horreur se cache dans nos os. Ross se produit à
haute bin Ladin devant les caméras de la presse. Maintient en jeep
seront encore il ya quelques années, l’Arabie jeunes dans le nord du
Pakistan émirs de son, là où aujourd’hui Les écoles coraniques
fleurissent, sous des tentes, des contes et des nuages de poussière
hochmittelalterliche leur art de chasser avec des oiseaux, dans le
dernier cri de traduire Aujourd’hui: Jeeps ont remplacé les chevaux, les
chameaux avions charters; gezähmte seulement le faucon et son objectif,
un rapace nomades des steppes, le ciel, Todesmutig restent comme ils
étaient. Nous oublions volontiers, et souvent, que les Croisés et les
Sarrasins, les mêmes chevaux montés, avant que le Vieux de la montagne
de ses assassins – mangeur de haschisch et de tueurs en même temps –
précipité à tous les deux. ” (FAZ du 5.10.2001: «Ceux qui se développe le désert. Le nouveau terrorisme et ses nomades»). La couleur de la scène: Lapis.”